La dendrochronologie est constituée d’une suite d’opérations qui ont toutes une importance fondamentale pour aboutir à de bons résultats. Après l’analyse d’un bâtiment par exemple ou du contexte archéologique dans lequel s’intègre un bois, nous avons précisé que le dendrochronologue accorde beaucoup d’importance au choix des échantillons qui, en fonction de la problématique posée, vise à constituer une séquence idéale. La rigueur avec laquelle sont prélevés les échantillons doit naturellement être accompagnée par la minutie avec laquelle sont préparés les échantillons soumis à la mesure. Tout comme le choix de l’emplacement du prélèvement sur une poutre ou celui du chemin de mesure sur une rondelle, l’acte de mesure n’est pas neutre, banal ou sans conséquence sur la suite de l’analyse. Cet acte conditionne encore une fois le résultat final attendu. Une bonne expérience et une bonne disposition à cet exercice influence très sensiblement les résultats. En effet, la part d’interprétation dans la lecture de la limite de chaque cerne ou dans l’appréciation de la croissance du bois dans son ensemble est importante. D’une personne à l’autre la différence obtenue sur la mesure d’un même échantillon suffit parfois à rendre possible ou non sa datation. Cette activité est donc pratiquée avec plus ou moins de réussite selon les individus. Il y a des cas d’extrême difficulté de lecture due à la densité de succession des cernes qui rend incertaine la limite de chacun d’entre eux. Il y a aussi, par exemple sur le chêne, les difficultés d’interprétation à passer d’un rayon médullaire à l’autre si le prélèvement ou la préparation est négligé. Il y a aussi plus subtilement la nécessité d’obtenir un « rythme de mesure » de qualité. Qu’entendons-nous par là? Pour les professionnels de la mesure qui travaillent directement sur une binoculaire et non sur un écran couplé à une vidéo, l’avancement du chariot est quasi continu, il est ponctué, à la limite de chaque cerne, par un bip sonore qui garantit que l’enregistrement électronique a bien été expédié par l’opérateur et bien réceptionné par l’ordinateur. Ce bip sonore résulte de l’ordre d’enregistrement que l’opérateur donne lorsqu’il repère la limite de chaque cerne. Cette opération réalisée avec un bon rythme garantit la validité de la valeur relative de la largeur d’un cerne par rapport au suivant (celle qui est exploitée par le dendrochronologue). Il ne suffit pas que la mesure soit gérée en valeur absolue car en pratique celle-ci varie en fonction des points de visée qui auront été choisis. En effet, la mire ne tombe pas toujours exactement dans l’axe du cerne et le déplacement répété de l’échantillon pose souvent autant de problèmes qu’il n’en résout. Le dendrochronologue doit donc faire en sorte de bien positionner son échantillon en fonction de la mesure d’une longue série de cernes, en minimisant les changements d’orientation de l’échantillon et en faisant ressortir le caractère effectif de la croissance du bois plutôt que de se limiter à l’enregistrement d’une variable non appréciée. Cette lecture « intelligente » implique effectivement un rythme de mesure continu, dégagée d’un maximum de contraintes techniques, matérielles ou même de distraction scientifique qui n’ont pas un lien direct avec l’appréciation de la largeur du cerne. De cette disponibilité et compétence à la mesure, il résulte un « rythme de mesure » que le bip sonore de l’ordinateur traduit sans équivoque. Toutes ces précisions nous servent à comprendre pourquoi le dendrochronologue préfère avoir le bois in situ, prélever et mesurer lui-même les échantillons et synchroniser les séquences. Dans chacun de ces gestes, il y a une part d’appréciation et d’interprétation dont il désire avoir a parfaite maîtrise pour en connaître les limites objectives. |